ALL I NEED ♦ ft. charlie b. bennett

Assise à terre de son appartement miteux, Isobel écrivait dans son journal intime. Journal qu'elle tenait depuis que son père était mort, il y a de cela trois ans. C'était une chose qui l'avait anéanti. Elle était très proche de son père, et il était le seul homme qui ne l'ait jamais déçue. Elle avait besoin de lui. Seulement voilà, il avait succombé à la maladie, et elle ne s'en était jamais vraiment remise malgré les années. Elle était âgée de 22 ans, et habitait encore chez elle. Elle venait juste de terminer ses études de droit, et n'avait pas eu le temps de se trouver un appartement en sortant. Mais la mort de son père lui a fait prendre conscience qu'il fallait qu'elle vole de ses propres ailes. C'est surtout parce qu'elle ne voulait pas rester avec sa mère. Elle ne s'était jamais entendue avec cette dernière, et penser qu'elle ne serait plus qu'avec celle qu'elle avait toujours détesté était juste abominable. Il n'y avait pas de raison précise à cette haine. Pearl Evan Davies était une femme assez banale, dont le métier était policière. Elle avait toujours énervé Isobel, bien que cette dernière n'avait pas vraiment de raisons pour ça. Donc à la mort de son père, elle avait vite déguerpi de chez sa mère. Depuis trois ans, elle ne lui parlait pas beaucoup. Voyant qu'elle était seule, elle fait quelques efforts, comme venir la voir de temps en temps au poste. Mais ça en restait là ; qu'une relation politiquement correcte. Enfin... Elle avait donc besoin d'écrire depuis ce fameux jour de Juin, pour évacuer. Tout était aller vite... Elle avait quitter ses camarades de classe, venait de perdre son père, et s'était enfin installée seule. N'étant pas du genre à se plaindre, même à sa meilleure amie, elle avait donc trouvé que le meilleur moyen était d'écrire ses impressions dans un journal.

Donc elle était là, assise à terre, écrivant. Elle ferma son journal et le posa à côté d'elle, et installa le stylo par-dessus. Vous vous demandez sûrement ce qu'elle faisait par terre. Non, ce n'était pas un hobbie. Juste que la jeune femme n'avait pas de canapé. Elle n'avait jamais été riche. Certes, elle avait l'argent pour s'acheter un canapé. D'ailleurs, il y a peu, elle en avait un. Mais il a cassé, Dieu seul sait comment, et étant un peu fauchée ce mois-ci, elle avait décidé d'attendre un peu avant d'en racheter un. Elle était stagiaire dans un bureau d'avocat, et ce n'était pas vraiment bien payé. Elle n'était pas complètement dans le métier disons. Mais elle savait qu'un jour, elle réussirait à être une grande avocate, et ce jour-là, l'argent ne sera plus un problème/ A cette pensée, Isobel sourit. Elle avait tendance à voir les choses d'un bon côté, même si la plupart déprimerait dans sa situation. Après tout, fallait voir le taudis dans lequel elle vivait : il n'y avait qu'une petite salle à manger, une cuisine encore plus petite, et une seule chambre, qui n'était équipée que d'un lit, et de quelques étagères pour poser ses fringues.

Alors qu'elle commençait à se faire chauffer des pâtes et qu'elle allait allumer la télé, car oui, elle avait une télé, quelqu'un sonna à la porte. Isobel regarda l'heure : 21h35. Qui pouvait bien venir à cette heure-ci ? Elle alla ouvrir, souriante, mais ce sourire disparut vite quand elle reconnut Charlie Bennett à la porte. Qu'est-ce que tu veux ? dit-elle en allant dans la cuisine. Elle le laissait entrer, après tout il n'abandonnerait pas, elle le connaissait. Bien qu'à l'université, au bout de quelques années, elle avait réussi à l'apprécier, et plus, depuis leur mariage à Las Vegas, il était devenu... Insupportable pour Isobel. Il s'amusait de cette situation, mais pas elle. Enfin, d'un certain côté, se dire qu'elle était la femme d'un tel mâle était plaisant, surtout que ses sentiments envers lui n'étaient pas inexistants. Mais il serait trop content qu'elle l'avoue, donc il en était hors de question !

© mia &orchestra &collapsingnight

Charlie arpentait pour la première fois depuis longtemps les rues du quartier de Bayview, aussi réputé pour être le quartier défavorisé de la ville. Autant vous dire que si le jeune homme n'avait pas une bonne raison d'y être ou plus particulièrement une personne à voir, il serait plaisamment allé passer sa soirée ailleurs. Il était sorti de son bureau aux alentours de vingt heures, une réunion à laquelle il devait assisté avait traîné en longueur. Il était employé dans un des journaux locaux de San Francisco depuis un peu moins de six mois, est était quelque part fier d'avoir pu y être engagé pour lui-même sans avoir eu recours à l'appui de son père et tentait de respecter les règles et les horaires du journal, chose difficile pour le jeune Bennett qui n'avait pour ainsi dire jamais eu de limites. Il parcouru à pied les quelques mètres qui séparaient son travail de son appartement, prit une douche rapide et se changea en quelque chose de plus confortable. Un jean et un tee-shirt feraient l'affaire. C'était vendredi soir et Charlie prévoyait de sortir à nouveau, il ne voulait certainement pas entrer dans l'adage « métro, boulot, dodo » à à peine vingt cinq ans. Une petite heure après être entré dans son appartement, il en ressortit prenant sa voiture pour une destination encore inconnue. Il passa en revue les endroits où il pourrait se rendre quand un visage apparu étrangement dans son esprit. Oui, ça faisait bien trop longtemps qu'il n'avait pas pu croiser -et par la même occasion agacer- cette jolie brune. Voilà la motivation qui dirigeait le jeune homme vers les quartiers de Bayview.

Repérant l'appartement d'Isobel, il se gara rapidement et gravit les marches de l'immeuble pauvre pour se retrouver devant sa porte. Il frappa de manière considérable et continue jusqu'à ce que le visage souriant de la jeune fille apparut. Ce même sourire qui se dissipa quelques secondes plus tard lorsqu'elle l'aperçut. « Qu'est-ce que tu veux ? » Charlie répondit son accueil par son perpétuel demi-sourire, avant d'entrer à l'intérieur, la brune lui ayant laissé le passage. « Bonsoir. Je vais parfaitement bien, merci de t'en préoccuper. Et toi? » Avant qu'il ne puisse terminer sa phrase, Isobel s'était éclipsée dans la cuisine. Etait-elle déjà agacée par sa présence? Il l'attendit dans la pièce principale, jetant un coup d'œil rapide à l'appartement qu'il n'avait pas l'habitude de cotoyer, et bien différent de son loft ou ceux de son quartier. Très impatient, le jeune homme finit par se diriger vers la cuisine. Tandis qu'Isobel surveillait sa casserole sur le feu, Charlie s'approcha discrètement jusqu'à se retrouver juste derrière elle, quelques centimètres les séparant.

« Quoi? J'ai pas le droit de rendre visite à ma femme? » Il souffla ses paroles à son oreille mais intensifia sa voix sur ses deux derniers mots, comme pour les accentuer. Il n'avait pas de raison particulière à sa venue, et il n'allait très certainement pas avouer qu'il voulait vraiment la voir alors il entrait dans un terrain glissant, il en était conscient. Depuis leur mariage imprévu à Las Vegas, il prenait un malin plaisir à la voir dans tous ses états dès que le sujet entrait dans la conversation. Il l'insupportait, il le savait. Il y a quelques années, pendant leur période à l'université, il avait su lui montrer une autre facette de sa personnalité, de même lorsqu'il l'avait revu à Vegas malgré les quelques verres d'alcool qu'il avait bu, il avait éprouvé quelque chose qu'il n'arrivait pas encore à expliquer. De l'attirance certes, mais aussi un ressenti particulier et surtout indéfinissable pour le garçon. Sauf que depuis leur retour, ils semblaient être revenu au point initial. C'était le principe même leur relation visiblement. Un pas en avant, deux pas en arrière. Il resta un moment derrière avant de se reculer et s'appuyer sur un des murs de la cuisine, l'observant de loin et attendant une quelconque réaction de sa part, toujours ce même sourire en coin sur les lèvres.

Ella Isobel Davies Bennett. C'était maintenant comme ça qu'elle s'appelait. Bien sûr, elle ne l'avait dit à personne, même pas à sa famille ou à ses amis les plus proches. Histoire d'éviter les "Mme. Bennett". Elle n'était pas naïve ; elle savait que la plupart des filles de San Francisco aimerait être la femme de ce cher Charlie, rien que pour sa beauté incontestable. Mais elle ne le connaissait pas, contrairement à Isobel. Cette homme était juste insupportable, et encore plus depuis leur mariage. Le fait qu'il faisait exprès de ramener le sujet de ce mariage sur le tapis l'agaçait au plus au point, et ça semblait être une occupation très distrayante pour lui. Certes, Isobel ne pouvait pas dire qu'elle le détestait. Ce serait totalement faux. Elle avait même cru l'aimer. Peut-être que c'était ça, de l'amour. Mais elle en doutait. Du moins, elle n'espérait pas. Déjà parce qu'un homme comme ça ne tombera jamais amoureux, et surtout pas d'une femme pauvre comme elle. Mais en plus parce qu'elle savait qu'être amoureuse de ce genre de mec était une mauvaise chose. Au final, ils finissent toujours pas vous trahir, n'est-ce pas ? C'était ce qu'elle se disait lorsqu'elle commençait à lui refaire confiance. Durant leurs années d'études à l'université, elle avait découvert une facette de lui que personne ne connaissait. Un homme attentionné, avec un coeur... Mais elle essayait de ne pas se faire de fausses idées sur son compte, et donc à la fin de ses études, elle n'a pas gardé le contact, elle a tenté de l'oublier. Jusqu'à ce fameux soir de Las Vegas. D'ailleurs, ils ne s'étaient pas beaucoup vu depuis leur retour, et ça arrangeait plutôt bien Isobel, qui n'avait aucune envie de ressasser cette histoire, bien qu'il fallait qu'ils trouvent une solution à tout ça. Ils n'allaient pas rester mariés... Si ?!

Isobel secoua la tête. Penser à Charlie alors qu'elle faisait cuir ses pâtes. Non mais ça va pas la tête ? Etant tombée sous son charme à l'université, elle avait décidé de mettre un terme à cette relation à la fin de leurs études, elle s'interdisait d'y penser. Les résultats n'étaient pas brillants... Des coups à la porte la sortie de ses pensées, et toute souriante, elle alla ouvrir... Avant que son sourire ne disparaisse en voyant Charlie. En parlant du loup... Isobel soupira et revint dans la cuisine. Elle savait pertinemment qu'il était entré, puisqu'elle entendait sa voix se rapprocher d'elle. Ca ira mieux quand tu seras parti... Et quand j'aurais mangé. Elle ne savait même pas pourquoi elle lui répondait. S'occupant de ses pâtes, elle ne sentit pas qu'il venait de se mettre derrière elle, jusqu'à ce qu'elle sente son souffle chaud derrière son oreille. Elle arrêta ses mouvements, se détestant pour aimer cette sensation qui parcourut son corps. Lorsqu'il l'appela "ma femme", elle frissonna. Elle se retourna et s'adossa contre la paillasse pour se retrouver face à face avec lui. Elle gardait toujours cette expression de profonde agacée pour ne pas montrer qu'elle était perdue. Eh bien... Ca dépend de ce que tu veux. Si c'est pour encore me parler de "CA", je me serais bien passée de ta visite. Elle lui faisait toujours comprendre que sans lui, elle serait mieux. C'était probablement vrai. Mais d'un autre côté, elle savait qu'il y aurait un vide dans sa vie s'il n'était pas là... Elle regarda ailleurs quelques secondes, puis reporta son attention sur Charlie. Tu veux quelque chose à boire ? Elle était tout de même polie avec elle. Puis il n'était pas venue de son quartier de riche juste pour ça, il devait bien vouloir rester un minimum de temps... Et elle ne voulait pas qu'il parte. Elle ne saurait l'expliquer, mais c'était comme ça. Bien qu'elle ne lui montrerait pas...

« Ca ira mieux quand tu seras parti... Et quand j'aurais mangé. » Il leva les yeux au ciel à ses mots. Elle lui montrait qu'elle n'avait pas besoin de lui dans sa vie, et il faisait tout pour qu'elle le pense. Sauf que malgré l'accueil d'Isobel il revenait toujours, et malgré les réflexions de Charlie elle ne le mettait jamais dehors. Masochistes ? Ils l'étaient peut-être un peu. Mais il y avait toujours quelque chose qui les ramenait l'un vers l'autre. La preuve, même lorsque la jeune Davies avait choisi de ne pas garder contact avec lui, ils s'étaient retrouvés dans la même fête alors que Las Vegas en comptait des centaines et qu'ils étaient tous les deux en excursion là bas, le même week end. Et bien que Charlie ne soit pas du genre à croire au destin, il fallait bien avouer que le hasard y était pour quelque chose dans leur mariage. L'alcool aussi, en grande partie. Et peut-être un reste de leur attirance passée. Enfin, pas si passée que ça puisque lorsqu'il s'approcha pour arriver juste derrière elle, elle cessa tout mouvement, et de son côté, il ne comprenait pas non plus pourquoi même un futile rapprochement paraissait prendre une tout autre dimension quand c'était avec elle et uniquement avec elle. « Eh bien... Ca dépend de ce que tu veux. Si c'est pour encore me parler de "CA", je me serais bien passée de ta visite. » Elle s'était retourné et il soutenait son regard, si bien qu'il ne répondit pas instantanément à sa remarque comme il l'aurait fait d'habitude. Il finit par s'éloigner pour reprendre entièrement possession de ses moyens et elle détourna le regard. « Je ne suis même pas sûr que tu me laisserais entrer si on n'était pas mar- » Charlie coupa sa phrase histoire de ne pas dire à nouveau le mot prohibé. « ...enfin, si ''ça'' n'était pas arrivé. Donc c'est plutôt pratique... » Il reproduisit les guillemets à l'aide de ses doigts lorsqu'il prononça le ''ça'' pour accentuer l'absurde de la situation. Et puis c'est pas comme si quelqu'un pouvait les entendre.

D'ailleurs, quasiment personne n'était au courant, il avait respecté son désir de ne pas ébruiter l'histoire alors il pouvait bien en parler lorsqu'ils n'étaient que tout les deux, surtout qu'il ne pouvait même pas consommer son mariage avec sa femme. Il faudrait aussi qu'ils reparlent de ça un jour s'ils voulaient trouver une solution mais ce n'était absolument pas dans les priorités du jeune Bennett, et encore moins de mettre le nez dans des papiers d'annulation ou de divorce ou quelque soit sa décision. De toute façon, le peu de personnes étant au courant dans son entourage étaient ses amis très proches et connaissaient les conditions dans lesquelles s'étaient déroulés le mariage, et savaient qu'il avait été le fruit d'un peu trop d'alcool et du fait qu'ils se trouvaient à Las Vegas. Alors, marié ou non ça ne changeait absolument rien dans sa vie quotidienne mis à part d'avoir ce genre de conversation avec la jolie brune et apparement un accès à son appartement. « Et puis avoue que je t'ai sauvé d'un vendredi soir en solitaire. » Il afficha un sourire en coin. Il ne savait même pas si elle avait des projets mais d'après son repas fait maison, il se doutait qu'elle n'allait pas sortir par la suite, ou attendait quelqu'un. Et puis elle ne lui aurait pas proposé quelque chose à boire si elle ne voulait pas qu'il reste au moins pour les prochaines minutes. « Quelque chose à base d'alcool si tu as, sinon de l'eau ça ira. » Il décida d'abandonner le sujet du mariage, du moins pour le moment. Il avait l'impression qu'ils n'avaient pas eu de réelle conversation depuis une éternité. Il ne se souvenait pas vraiment des paroles qu'ils avaient échangé lorsqu'ils étaient à Vegas, mais vu leur état ils n'avaient sûrement pas du avoir une discussion constructive. Et depuis ils n'avaient fait que s'entrecroiser. Il posa à nouveau son regard sur Isobel et l'évolution de ses pâtes. « Qu'est-ce que tu deviens ? »

Quand Isobel pensait à sa nuit à Las Vegas, LA fameuse nuit, elle ne savait pas trop quoi penser. D'un côté, il s'agissait de la pire nuit qu'elle n'ait jamais vécu, puisqu'elle avait fait la plus grosse erreur de sa vie. Ce mariage, elle ne savait pas comment le gérer. Elle savait que cela ne signifiait rien ; ni pour elle, ni pour lui. Heureusement qu'elle n'avait pas de famille. Son père était mort, et elle n'était pas en contact avec le reste, puisqu'ils les avaient rejetés à la faillite de son père, alors qu'Isobel n'avait que deux ans. Devenu "pauvre", contrairement aux autres, ils avaient été mis à l'écart. Isobel était fille unique, et donc il ne lui restait que sa mère. Ca ne serait pas très dur de lui cacher ce mariage, sachant qu'elles ne se parlent pratiquement pas. Mais cela ne l'empêchait pas de se reprocher ce geste à elle-même. Elle se demandait ce qui avait bien pu lui passer par la tête à ce moment-là. Même ivre, elle aurait dû réfléchir un minimum aux conséquences. Puis d'un autre côté, il y avait un soulagement. Elle ne savait pas trop pourquoi. Elle n'était sûrement pas indifférente aux charmes de Charlie, et être sa femme n'était pas la chose la plus dérangeante sur Terre. Pourtant, elle savait que ce n'était pas ça qui ferait qu'il lui "appartiendrait". Elle ne signifiait rien pour lui, et il irait toujours voir ailleurs. Et puis pourquoi pensait-elle à ça ? Quand est-ce qu'elle a déjà eu envie de "posséder" Charlie ? Il était tout ce qu'elle détestait chez un homme : arrogant, sarcastique, orgueilleux... Il ne pensait à personne à part lui, et avait le don d'être toujours désagréable. Et pourtant, elle ressentait quelque chose à chaque fois qu'elle le voyait, qu'elle ne devrait pas, qu'elle ne voulait pas ressentir. Comme le frisson qui venait de la parcourir quand il se posta derrière elle. Et surtout, elle détester le fait de ne pas vouloir divorcer.

Alors qu'elle s'occupait toujours de ses pâtes, Charlie revint sur le sujet. Bon, elle l'avait lancé, en insistant sur le "CA". Elle n'aurait pas dû en parler de cette façon, puisque ça n'allait que lui donner envie de l'embêter encore plus avec ça. Elle réfléchit à ce qu'il venait de dire, tout en se retournant vers lui alors qu'il s'était adossé à un mur. Eh bien... On ne peut pas dire qu'on ait pu testé cette théorie. Est-ce que tu es déjà passé me voir avant cet épisode ? La dernière fois qu'on s'est vus, j'habitais encore dans ma chambre d'étudiante... Sa phrase sonnait comme une sorte de reproche pour ne pas lui avoir donné de nouvelles. Mais en réalité, elle ne savait pas très bien qui avait coupé le contact. Peut-être qu'ils attendaient tous les deux que l'autre l'appelle... Ou bien qu'ils avaient tous les deux décidés de s'éloigner. C'était la décision d'Isobel. Elle voulait s'éloigner de lui, même si elle espérait constamment que ça soit lui lorsque son téléphone sonnait. Pendant quatre ans elle l'avait espéré. Et maintenant, elle était mariée avec lui... Surréaliste vous avez dit ?

L'avantage d'être mariée avec Charlie, c'était qu'elle pourrait gagner, quoi qu'il arrive. Elle pouvait le garder pour elle, et on peut dire qu'avoir le nom Bennett était assez gratifiant, et qu'elle ferait des jalouses. Et s'ils décidaient de divorcer, elle pourrait y gagner beaucoup d'argent. Quoi que, la solution était à envisager en dernier recours. Plus longtemps elle resterait mariée à Charlie, mieux elle se porterait. Enfin, elle pensait exactement le contraire et lui affirmait que le mieux serait qu'ils ne soient plus en contact, mais au fond, elle l'avait toujours désiré. Il lui arrivait même de rêver de lui la nuit, imaginant qu'ils seraient heureux, sans tromperie. C'était vraiment un rêve, car Charlie ne sera jamais fidèle, du moins pas dans cette vie.

Toujours occupée avec ses pâtes, Isobel haussa les épaules à sa remarque. Si tu n'étais pas venu, j'aurais toujours pu trouver quelque chose à faire... Elle mentait. La vérité était qu'elle ne voulait pas lui avouer qu'elle avait prévu de passer sa soirée seule. Et surtout, qu'elle était bien contente de le voir là. Alors qu'elle retournait à ses pâtes, elle lui proposa à boire, et sa réponse ne la surpris pas le moins du monde. Elle alla ouvrir un placard en hauteur et regarda Charlie. Choisis... Dans ce placard se trouvait toutes sortes d'alcool, qui pourrait en impressionner plus d'un. On pourrait se croire dans une réserve de bar. Fais pas cette tête, t'es bien content qu'il y ait autant de choix. Je sais pas s'il y en aura toujours autant demain... Elle roula les yeux au ciel et lui laissa le temps de choisir sa boisson avant de le servir, et de se servir par la même occasion. Elle retourna à ses pâtes et alors qu'elle allait s'apprêter à répondre à Charlie en versant les pâtes dans une passoire, son plat tomba à terre, contenant les pâtes et l'eau bouillante. Une fille qui ne sait même pas se préparer des pâtes... MERDE !!! Elle soupira et colla sa main à son front en regardant les dégâts. C'est pas possible... Elle aurait normalement était hors d'elle, mais elle était plus gênée qu'énervée. Elle leva les yeux vers Charlie. Je suis désolé. La jeune femme commença à nettoyer, quand elle vit Charlie se baisser pour l'aider. Elle s'arrêta un moment pour le regarder, avant de reprendre ses esprits. Merci... Lorsqu'ils eurent tout fini, ils reprirent leurs verres et Isobel se dirigea vers le salon. Je t'aurais bien dis "assied-toi", mais comme tu vois... Y a que le sol pour s'asseoir. Et je pense pas que ça soit ta tasse de thé, n'est-ce pas ? Après tout, il était riche, et s'asseoir par terre n'avait jamais été une option. Isobel se sentait toute petite tout d'un coup, alors que ce n'était pas son habitude face à Charlie. Depuis qu'elle l'avait retrouvé à Las Vegas, elle n'était plus aussi "forte". Etait-ce dû au mariage ou bien à des sentiments qu'elle n'avait jamais pensé ressentir pour lui et qu'elle s'efforçait à effacer ?

Quatre années qu'ils ne s'étaient pas revus. Il s'était souvent demandé comment en habitant dans la même ville, ils ne s'étaient plus jamais recroisés depuis le moment où ils avaient décidé de ne plus se donner de nouvelles. D'accord, ils ne faisaient pas parti du même monde, ne traînaient pas dans les mêmes quartiers mais il se disait qu'ils auraient pu se rencontrer à peu près dans n'importe quel autre endroit du centre ville, des lieux communs du genre le cinéma ou le supermarché. Mais non, il avait fallut qu'ils se croisent pour la dernière fois dans sa chambre universitaire. « Eh bien... On ne peut pas dire qu'on ait pu testé cette théorie. Est-ce que tu es déjà passé me voir avant cet épisode ? La dernière fois qu'on s'est vus, j'habitais encore dans ma chambre d'étudiante... » Elle le faisait entendre comme un reproche. Peut-être en était-ce un ? Il ne savait plus vraiment. En réalité, lorsqu'elle ne l'avait plus rappelé, il en avait tout bonnement profité pour prendre la fuite. Elle commençait à prendre une place démesurément grande dans sa vie, voire même dans son cœur et il avait préféré partir plutôt que de laisser ces sortes de sentiments prendre le dessus. « Tu n'as plus cherché à me joindre non plus... » Ça sonnait également comme un reproche, du moins aujourd'hui. A l'époque, il avait été en quelque sorte soulagé qu'elle ne lui laisse pas des messages, la décision avait été beaucoup plus facile à prendre pour lui. Il avait pu reprendre pleinement ses anciennes habitudes, ses histoires sans lendemains, bien qu'il ne les avait pas totalement arrêté lorsqu'ils étaient ''ensemble''. Il avait pu l'oublier, ou du moins essayer de le faire. Quoiqu'il en dise il n'avait clairement pas réussi vu la manière dont ils s'étaient retrouvé cette fameuse nuit quatre ans plus tard. Certes, l'alcool y avait joué mais ça ne faisait pas tout.

« Tu aurais voulu que je le fasse ? » Il parlait bien évidemment du fait qu'il ne soit pas passé la voir depuis des années. Il avait d'ailleurs prononcé cette phrase sans vraiment y réfléchir, les sujets sérieux c'était pas son truc, c'est bien connu. C'est la raison pour la laquelle il utilisait sans cesse le sarcasme, de manière à toujours rester en dehors de ce type de conversation. Il remercia mentalement la maladresse d'Isobel ou quelque soit la raison pour laquelle elle avait renversé ses pâtes. Avec un peu de chance elle oublierait sa question, et ils pourraient repartir sur un sujet plus léger bien que, la connaissant, il en doutait fortement. « MERDE !!! Je suis désolée. » Il laissa échapper un rire en voyant sa réaction et les dégâts causés dans la cuisine mais s'apercevant de sa gêne, il s'accroupit pour l'aider, jetant les pâtes et épongeant l'eau bouillante sur le sol. Au bout de quelques minutes, tout était en ordre et on aurait presque pu croire que rien de la sorte n'était arrivé. Il était plutôt fier de lui, pour quelqu'un qui avait rarement nettoyé dans sa vie, même si la brune avait fait la majorité du boulot. En relevant la tête, il croisa son regard avant de se remettre debout. « Tu m'étonneras toujours, Davies. » Il faisait aussi allusion aux nombres de bouteilles d'alcool qu'elle cachait dans son placard, il savait qu'elle ne lésinait pas sur l'alcool mais au point d'avoir une telle collection il était plutôt surpris.

Il suivit la jeune femme dans le salon, profitant d'un moment d'inattention de sa part pour subtiliser une des bouteille, qu'il cacha derrière son dos, gardant son verre dans son autre main. Il jeta un coup d'œil plus approfondi que la première fois sur la pièce... comment dire ? Minimaliste. « Je t'aurais bien dis "assied-toi", mais comme tu vois... Y a que le sol pour s'asseoir. Et je pense pas que ça soit ta tasse de thé, n'est-ce pas ? » Il s'aperçut à ses mots qu'il n'y avait en effet rien pour s'assoir. Il resta quelques secondes debout avant de ré-étudier sa décision, il n'allait pas rester debout toute la soirée. « Pas vraiment, mais je suppose que je m'y attendais un peu. » Certes, il ne pensait pas ne rien trouver pour s'assoir mais il n'allait pas partir maintenant sous ce prétexte. Il traversa la petite pièce et s'installa finalement aux côtés d'Isobel, le dos adossé au mur en guise de dossier. Il posa devant eux l'alcool dérobé quelques instants plus tôt, le regard de la brune s'alternant entre la bouteille et lui. « Quoi? Il peut rien nous arriver de pire que la dernière fois, si ? » Il tourna la tête vers elle, un sourire narquois aux lèvres, rien qu'en y repensant. D'autant plus qu'il trouvait ça fascinant de ne pas avoir été mis dehors à sa première remarque et surtout le fait qu'Isobel n'ait pas une seule fois parlé divorce ou annulation. Il leva son verre avant de trinquer avec celui de la brune. «D'ailleurs, je pense qu'il faudrait fêter dignement notre premier mois de mariage. » Il but son verre d'une traite, l'imaginant lever les yeux au ciel. Il ouvrit la bouteille pour se resservir, de toute façon, à l'heure qu'il était il serait probablement dans un bar à boire tout autant et à draguer la première fille à son goût. Il reposa sa tête en arrière contre le mur, la fatigue de sa journée prenant le dessus pendant quelques secondes mais se doutant que dès que l'alcool aurait fait son effet, elle disparaîtrait. Il ferma les yeux quelques secondes avant de les réouvrir et se surprit à jouer de sa main libre avec les doigts d'Isobel. « Qu'est-ce que tu fais de ta vie depuis quatre ans ? »